
Chronique
Les "Fashion Weeks" : influence de trafic
Publié le par Erwan Rambourg
Découvrez les chroniques régulières d’Erwan Rambourg, analyste de référence du secteur du luxe. Fort de son expérience chez HSBC, LVMH et Richemont, il partage chaque mois son regard affûté sur les grandes mutations de l’industrie.
Ce n’est pas la place d’un analyste financier de commenter sur la fashion week car clairement d’un point de vue stylistique, vous trouverez des experts bien plus compétents. Il y a pour autant plusieurs éléments dans les développements récents qui devraient exercer une influence positive sur l’évolution des performances financières des groupes :
• Redonner envie
Les ventes de luxe ont ralenti fortement depuis 18 mois. Les marques faibles accusent la macro – les droits de douane, le marché immobilier en Chine, les tensions géopolitiques – quand la réalité est bien plus prosaïque. Les produits étaient devenus trop chers et il y avait un manque de créativité. Les deux problèmes étaient corrélés dans la mesure où les managers du luxe voyant le rebond après la réouverture du monde post COVID se sont dit "elle fait la queue pour acheter mes produits, je peux donc augmenter mes prix et je peux continuer à vendre ce que j’ai car ça lui plaît". La réalité est qu’elle avait besoin un peu de retail therapy en sortie de COVID mais que 2 ans après, elle s’est dit : "c’est toujours le même sac et il est 60% plus cher, aucun intérêt d’y retourner".
Nous venons d’assister à une déferlante créative avec plus de 15 directeurs créatifs qui ont défilé pour la première fois pour leur nouvelle marque sur les dernières semaines. Après un désengagement de la clientèle, tous ces lancements vont sans doute donner des occasions de découvrir ou redécouvrir des marques.
• Repositionner
Demna qui était très attendu chez Gucci, dont l’actionnaire Kering est en train de vivre une révolution managériale, a complètement réouvert la marque. Sous Alessandro Michele, la marque avait trouvé un grand succès malgré un positionnement assez niche sur l’exubérance et le jeunisme. Sous Sabato, la marque avait suivi un peu tardivement la vague du quiet luxury ce qui était à la fois niche et sans doute inadapté par rapport à l’histoire et à l’ADN de la marque.
Avec une présentation de 37 personnages, Demna vous dit "quel que soit votre genre, votre âge, votre nationalité, vos moyens, votre style, venez chez Gucci, nous aurons quelque chose pour vous". En d’autres termes, la collection présentée est une invitation à la redécouverte d’une marque qui s’était sans doute un peu égarée et qui était devenue très peu visible. Accompagnée d’un film controversé, le défilé de Gucci a remis la marque au centre de la conversation fashion. Encore une fois, sans jugement sur le style, l’approche vise le retour des fans ainsi que le recrutement.
• Générer du trafic
Ce qui a le plus péché dans le luxe depuis un an et demi, c’est ce désintérêt graduel et l’émergence de substituts.
D’un point de vue financier, l’impact le plus important à attendre de ces fashions weeks, c’est sans doute avant tout la génération de trafic. Est-ce Jonathan Anderson va bien vendre chez Dior ? Blazy chez Chanel ? Ou Demna chez Gucci ? Je n’en sais rien. En revanche, il est assez évident qu’un plus grand nombre de clientes va désormais pousser la porte quand les collections printemps été arriveront en boutique d’ici peu. Ce qui fera la différence, comme souvent, sera la capacité des vendeurs de convertir ce trafic.
Si la collection de Demna ou d’Anderson ne vend pas autant qu’espéré, l’idée est de profiter du trafic pour vendre autre chose. C’est un peu comme le débat sur le lancement de la beauty chez Louis Vuitton. Est-ce que Vuitton veut devenir le leader en rouge a lèvres ? Je ne crois pas. En revanche, si la marque peut profiter du trafic généré par le lancement de la beauté pour vendre ça ou autre chose, tant mieux.
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